Après Failing Songs et Drinking Songs voici The Howling Songs, troisième album du musicien anglais Matt Elliott, du moins sous son propre nom puisque les amateurs de musique électronique profonde et hantée connaissent sans doute son premier projet Third Eye Foundation. Le troisième et dernier volet d’une trilogie, une même unité de temps en effet (vent faible ou fort selon les opus sur une pluie fine), de lieu (quelque part entre le canapé de notre auteur/compositeur/interprète et les paysage de Bohème) et d’inaction (musique immobile, comme figée presque avec néanmoins une bouleversante et implacable force émotionnelle). Une unité graphique aussi avec des (superbes) pochettes éclairant avec justesse leur contenu.
Alors, ce disque, un simple troisième calque d’un même dessein noir et gris ? Oui et non. La musique est toujours aussi sombre en effet et un sentiment immédiat de familiarité saisira l’auditeur s’il connaît les deux albums précédents. Mais on devine au fil du disque un coté plus apaisé, plus aéré même si le caractère claustrophobe de cette musique est toujours aussi fort (disons pour imager qu’on a simplement ouvert une fenêtre de la chambre du mort, et tant pis s’il pleut).
Des compositions acoustiques minimalistes, sorte de folk neurasthénique, sur lesquelles l’anglais s’en vient murmurer de lugubre manière des paroles fatalistes et noires avec bien souvent des accompagnement de violons tziganes en fin de vie, quelques accords de mandoline mélodramatiques ou encore (bien souvent) des accélérations soudaines de l’emphase avec tout ce maelstrom réuni qui laisse à penser que la foudre vient de tomber sur les instrumentistes.
Si Failing Songs reste le chef d’œuvre de Matt Elliott, Howling Songs creuse le même sillon avec un à-propos certain et une « musicalité » accrue, une capacité toujours riche à forger des images chez l’auditeur (la pluie, la marche funèbre accablée sous le vent, les chants de marins fantômes, les paysages décharnés de Bohème et tant d’autres). Les amateurs de Beirut qui ne craignent pas le crachin, la noirceur et la dépression au-dessus du jardin (laissé à l’abandon) devraient aimer cette musique, les neurasthéniques notoires en mal d’émotions lourdes, eux, s’en gargariseront matin, midi et soir.
- Bruno Piszorowicz, le 15 01 2009