Rien de moins qu’une authentique caisse de pin remplie de trouvailles diverses. Voilà la dernière mise de Jason Molina qui semble-t-il vide ses tiroirs à l’entame de l’automne. On a de quoi être suspicieux à plus d’un titre : son groupe a tendance à tourner un tantinet en rond depuis Fading Trails, qui n’a de loin pas convaincu à sa sortie. Et que peuvent donc apporter de mieux ces quatre cds (plus un DVD) qui reprennent l’intégralité des quatre sessions dudit album (donc, si vous suivez bien, Fading Trails = odieux best of avant l'heure)?
Je comprendrai l’acheteur sceptique qui lorgnera vers d’autres songwriters folk-rock du moment, question budget notamment. Il ne saura ainsi pas que Magnolia Electric Co. est enfin sorti de son sillon Crazy Horse en pondant un album majeur, coincé entre la session de Steve Albini (Nashville Moon) et le EP 4 titres (Sun Session).
Estampillé Black Ram, produit par David Lowery (Camper Van Beethoven, Sparklehorse), les neuf compos découpent les atmosphères de mini-westerns entre pluie et marécages, tantôt secoués par quelques riffs plombés par la chaleur. On nage en plein territoire insulaire, à la manière d’un Ghost Tropic revu et corrigé. Hormis Jason Molina et sa voix accrochée au ciel, les membres de ce nouveau supergroupe (qui compte entre autres Andrew Bird) n’ont rien de commun avec le groupe live de ces dernières tournées. De haute voltige, des titres comme «Blackbird» ou «Will-O-the-Wisp» assurent le quota de frissons propres aux compositions qui feront date.
Pour un peu qu’on en oublierait le reste de la brouette. Ainsi, Nashville Moon demeure en territoires plus country-rock, notamment par la composition traditionnelle du groupe (parmi lesquels l’inoxydable Steve Albini). Pas (trop) de surprises et de risques pris, si ce n’est un «What comes after the blues» au refrain bondissant bien rôdé que l’on sifflote volontiers, ou une balade douce-amère («Nashville Moon») brillante et enluminée de cuivres. Mention honorable, donc, gros son taillé pour le live, mais on se dit que cette page est en train de se tourner.
Shohola est bien plus intéressant en tant qu’album de pur songwriting, Molina face à sa seule guitare acoustique avec quelques arpèges compose des chansons d’une simplicité bluffante, contrastant avec les autres sessions. En même temps, ses tonalités plus boisées le rendent bien supérieur au dernier album solo de Molina (Let me go...). Malheureusement très court (25 minutes), on reste un peu sur sa faim. Et ce ne sont pas les quatre titres des Sun Session qui en donneront plus à ronger, ni le bref DVD, qui se laisse voir comme un film musical.
Au moment de passer à la caisse enregistreuse avec notre coffre au trésor (d'autres surprises s'y cachent !), on admire ma fois ce petit bonhomme créant autant à la fois dans nombre de registres différents, au point que chacun y trouvera son compte. Ceci étant, les humeurs changeantes de Black Ram rafflent la mise et seront, espérons-le, la boussole de Molina pour les prochaines bornes à franchir.
- runeii, le 27 08 2007