Entrer dans l’univers fascinant d’Amon Tobin, c’est souvent devenir Alice au Pays des Merveilles en version 3ème millénaire, et se retrouver largué dans un monde où pure technologie se mélange intimement à la magie humaine. Hybride, donc, et c’est particulièrement vrai pour ce septième album marquant une rupture dans l’approche inédite du sampling.

Foley Room accentue la quête inlassable du Canadien pour les textures sonores, regroupées selon des thématiques bien précises et agencées de manière à renverser toutes vos idées établies. Collecte de sons proprement démentielle (boîtes à musique noyées, tigres en cage, robots et mécaniques d’usines, moteurs en tous genres, abeilles !!) menée entre Montréal et Paris, l’électro de Foley Room tourne la page Chaos Theory et s’apparente plus à une nouvelle forme de "musique concrète" ou filmique.

Ainsi invite-t-il rien de moins que le Kronos Quartet pour amener par ses cordes le supplément d’âme nécessaire aux machineries de "Bloodstone", en contrepoint délicieusement sombre. La harpe solaire de Sarah Page ("Horse Fish") évoque une BO de Babel, corrigée par l’aléatoire du séquenceur. Surprise de taille, "Esther S" détourne tous les clichés de la musique surf pour en ériger une version mutante à base de samples incongrus (guitare baryton vrombissante et chœur de pétarades d’Harley Davidson). Incontestablement Foley Room s’avère être un impressionnant travail de producteur, musicalement bien au dessus d’une quantité d’œuvres du même acabit.

Mais d’ambitieux, l’exercice devient périlleux sur la longueur et inévitablement casse-gueule par moments (le zoologique "Big Furry Head" ou la post drum’n bass éprouvante du titre éponyme) ; l’approche a ses limites, donc, l’œuvre pouvant parfois manquer de cohérence. Complexe mais pas encore totalement décérébré, Amon Tobin reste dangereusement futuriste, raison pour laquelle vous devez absolument jeter une oreille à cet étrange objet humanoïde.


- runeii, le 25 03 2007