1971 : Neil Young est à son apogée créative et à l’aube de son plus grand succès commercial. Après After the Goldrush, Harvest sortira dans quelques mois pour devenir l'album le plus vendu de l’année 1972. Concert retrouvant le loner seul aux commandes à la guitare acoustique et au piano, Live at Massey Hall témoigne de cette explosion créatrice : plutôt loquace, Neil explique qu’il va jouer une majorité d’inédits ce soir, vu qu’il a composé beaucoup de nouvelles chansons ces derniers temps.
Ce concert est diamétralement opposé au Live at the Fillmore East sorti quelques mois plus tôt : folk acoustique lunaire, retenue et mélancolie d’un côté, rock électrique, spontanéité, et déchaînement de l’autre. Les deux se rejoignent sur "Down By the River" et "Cowgirl in the Sand" (décidément...), ici en version acoustique.
Live at Massey Hall est un document important dans la genèse de Harvest, dont Neil Young interprète les toutes premières versions ; "A Man Needs a Maid" est lié à "Heart of Gold" dans la même chanson jouée entièrement au piano. Certaines paroles diffèrent légèrement des versions finales. On retrouve aussi plusieurs morceaux présents sur After de Golrush et Journey Through the Past, ainsi que 2 inédits - "Bad Fog of Loneliness" et "Dance Dance Dance". On reste donc dans des interprétations Harvestiennes classiques et minimalistes: une voix, une guitare ou un piano, et beaucoup de mélancolie. Si on devait faire la fine bouche on dirait qu’une certaine lassitude s’installe au fil des titres, même si on aurait du mal à trouver une seule mauvaise chanson.
Et d’un autre côté, on trouve des perles comme "Love in Mind", balade au piano présente sur l’album maudit de Neil Young, Time Fades Away, jamais réédité après sa version 33 tours en 1973. "Ohio", protest song écrite à l’occasion du massacre de Kent State en 1970, est l’un des meilleurs titres trop peu souvent entendus de l’interminable discographie du loner. Le nombre de chansons difficiles à trouver et la qualité exceptionnelle de l’enregistrement justifient l’achat pour tout fan qui se respecte, pour peu qu’il aime la période dorée de Harvest, qui précédera de peu une descente aux enfers marquée par la désillusion du succès et la mort par overdose de Danny Whitten.
- JP, le 14 03 2007