Imaginez-vous en mouche naïve, vous démenant dans l’obscurité d’une pièce inconnue, en quête d’une ouverture vers une liberté que vous supposez si proche. Claustrophobe, obsédant, cet Offshore se veut un vol aux trajectoires imprévisibles, ici panique en milieu inconnu, là manque d’oxygène… Tout y est glacé, nous incitant à (dés)espérer de grands espaces et de lumière.
Renouant avec les épiques new-wave et noisy des débuts du groupe, Offshore supplante allégrement les errances de All Harm Ends Here, dernier opus qui se cherchait. Conceptuel mais accessible, les 6 compos se chevauchent à la manière d’un opéra en plusieurs actes, formant un cycle d’allers et retours vers le titre originellement composé pour Let us Garlands Bring.
Pour l’anecdote, le titre originel reste à ce jour la composition la plus sidérante du groupe, réunissant une douce léthargie dream-pop que ne renierait pas le label 4AD et les déluges guitaristiques à l’apex proprement terrifiant. Le défi relevé d’en concevoir un album entier tient donc de la gageure.
Soutenu par une production fouillée (John McEntire de Tortoise n’y est pas étranger) et l’apport judicieux d’invités triés sur le volet (interprètes féminines comme Amber Webber de Black Mountain), Offshore alterne murs du son aux guitares flamboyantes façon Ride ou My Bloody Valentine («Land Of Pale Saints») et mélodies finement ciselées, sous contrôle absolu du maître d’œuvre Daniel Burton (voir les ellipses qui mènent au final tonitruant de «Hymn Beneath The Palisades»). Traître leçon d’hypnose, transe chamanique en condensé, les 37 minutes paraissent en définitive bien courtes. On represse volontiers la touche play.
Bande originale de vos propres versions de «Lost Highway», Offshore est un album que l’on admire avec une méfiance bien humaine face à tant de beauté impitoyable. A ce jour l’album le plus solide du groupe de l’Indiana.
- runeii, le 27 09 2006