Pas si facile de renouveler le genre "ambient" dévolu aux musiques sans frontières et aux expérimentations tous azimuts parfois abstraites, tout en restant accessible au grand public. Ce «Substrata», 4ème album du Norvégien Geir Jenssen, posera un jalon qui fera date. Purgeant le genre de ses excès (pas ici de synthés qui planent durant 75 minutes), Jenssen va privilégier une lecture fluide où chaque titre se veut un contraste du précédent.
Ce qui marque avant toute chose, c’est la profondeur de son obtenue. Les infra-basses de Biosphere sont denses, profondes, remuant nos tripes. Elles contribuent à évoquer les pulsations brutes, telluriques de notre planète : paysages polaires, magmas en fusion, falaises affrontant les flots. Utilisant des bandes enregistrées en tout genres (monologues, films), des collages sonores qui se noient dans les vibrations ou ses instruments qu’il plonge dans son mixeur implacable, il donne l’humanité nécessaire à ce que le voyage soit vécu de manière moins solitaire ou désespérée. Ainsi, un aspect mélodique fort contre-balance la rudesse qui se dégage de prime abord : on y éprouve mélancolie, douceur et émerveillement.
Ayant bien vieilli au point de devenir indispensable, «Substrata» est vite devenu un classique de l’ambient moderne, que Geir Jenssen ne dépassera plus ensuite en qualité ou en immédiateté. Cette expérience fabuleuse au pays des aurores boréales est à ranger aux côtés des meilleurs Brian Eno, Pete Namlook et autres Steve Roach.
- runeii, le 25 02 2006