On ne l'attendait pas ici Polly Jean. On était plutôt habitué à ses productions rock avec une guitare sur le fil du rasoir et des cris que l'on ne savait pas s'ils étaient de détresse ou de rage. White Chalk laisse le rock faire du sur place et s'en va vers des contrées mystiques et habitées. Quasiment composé uniquement au piano, Polly chante divinement et d'une voix hésitante entre assurance et vulnérabilité. Le frère John Parish est présent sur tout l'album et à la production (avec Flood) et Jim White (Dirty Three) à la batterie.

Album habité, sombre, émouvant, PJ Harvey vient de nous réussir rien de moins que son Nebraska. Sous une simplicité apparente, White Chalk se trouve être d'une densité étouffante tant certains morceaux nous prennent à la gorge (p. ex : "The Mountain"). La jeune fille n'a jamais fait beaucoup de faux pas, mais cette œuvre a quelque chose qui va la rendre intemporelle. Parce que justement elle se fait fit de ce qui l'entoure, comme si elle était coupée du monde environnant, touchée par la grâce, Polly Jean devait réaliser cet album, comme si sa vie en dépendait oserait-on dire. Le frisson qui nous parcoure l'échine en l'écoutant le souffle coupé sur "Grow Grow Grow", même si elle tente de mettre une distance entre notre monde et le sien sur "White Chalk", le refrain qu'elle élève au niveau du divin sur "The Piano" (Oh God I miss you), la lente litanie de "To Talk To You" ou l'oppressant et libérateur final de "The Mountain" ni font rien.

Si les années seront l'unique juge, avec ce petit bijou d'une durée de 34 minutes, Polly Jean Harvey vient de réaliser probablement son œuvre la plus intime et, peut-être, la plus aboutie. Un disque que l'on attendait pas forcément mais qui va rendre la tâche bien ardue pour certains suiveurs et détracteurs. Il sera difficile d'aller déloger la miss avant un moment, mais elle s'en fout probablement, PJ est entrée dans un autre monde, s'est dotée d'une nouvelle dimension...

- le sto, le 19 10 2007