Véritable chevauchée à travers les villes fantômes, mêlant quêtes et poursuites au cœur du sable, du sel et de la sueur, Henry’s Dream renoue avec une base de fans passablement égarés après le surcroît de douceurs de The Good Son. Entre un piano-bar amoché ou se bousculent des boogeys aux amphéts, les errances alcoolisées d’un Tom Waits et plusieurs furias d’un punk rock façon Gun Club, Nick Cave hante tout de sa présence, s’y produit sur le fil du rasoir, tour à tour tempétueux et apaisé.
Pic créatif au niveau de l’écriture des textes et des arrangements, développant un concept quasi cinématographique sur la sauvagerie du Grand Ouest, Henry’s Dream est considéré par son auteur comme l’un de ses plus mauvais albums !!! Non pas au niveau des compositions, toutes abouties et complexes, tant dans l’implacable fureur (un «Papa won’t leave you, Henry» désormais classique) que dans l’intime (la balade nocturne de «Loom of the Land»), mais en termes de production. Attribuée à David Briggs, qui aura à cœur d’arrondir les arêtes parfois trop rudes de ce patchwork, il attirera les foudres de son auteur. Le Live Seeds issu de la tournée consécutive corrigera rapidement le tir, révélant l’aspect véritablement hors-la-loi qui sous-tendait ce projet ambitieux.
Certains habitués du Nick Cave des dernières périodes jugeront certainement bourrin et dangereusement instable ce 7ème album des Bad Seeds. Pour ma part, Henry’s Dream restera la quintessence de la première partie de carrière discographique du poète australien.
Preuve à l’appui, la mélopée surnaturelle de «Christina the Astonishing», son orgue induisant frissons et ravissement au plus noir de la nuit. Et l’épique «John Finn's Wife», résumant à lui seul l’ensemble des Murder Ballads jamais écrites, la folie meurtrière au fond des yeux.
Indispensable compagnon de route et raconteur d’histoires, Henry’s Dream doit faire partie de votre discothèque idéale. Point final.
- runeii, le 28 01 2007