L’air du temps est au néo-folk et à la néo-country, et le label parisien Fargo ne s’y est pas trompé. Il nous propose une sélection des représentants suédois et norvégiens de la foisonnante scène néo-folk, plus ou moins connus sur la scène locale ou internationale. Référence à Lee Hazlewood et son légendaire «Cowboy in Sweden», la pochette ainsi que le contenu de cette galette alternent surprises et déceptions, nous laissant au final quelques pistes à explorer plus en avant.
Au rang des bonnes surprises, Nicolai Dunger nous offre avec «Soul Rush» une véritable perle de folk incandescent, mâtiné de sonorités d’Europe de l’Est. Cette rengaine obsédante nous met face à une voix inimitable, cabossée et souvent à la limite de la rupture, quelque part entre Layne Staley (feu leader des Alice in Chains) et David Eugene Edwards. La référence aux mythiques Sixteen Horsepower est aussi parfaitement adéquate pour The Lancaster Orchestra («Bad Horse»), dont le punk-folk emprunte l’esprit hors-la-loi et les sentiers poussiéreux ; le timbre, le banjo, la rythmique enjouée, on croirait entendre les Américains au temps de «Sackcloth and Ashes». Troisième bonne surprise, qui n’en n’est plus vraiment une (de surprise) : Jose Gonzalez est présent à la fois en solo (un titre impeccable de sa dernière réussite, « Veneer ») et entouré de Junip, son dernier groupe (reprise éclairée du «Ghost of Tom Joad» de Springsteen).
Au-delà de ces quatre compos de haut vol, on rencontre quelques titres moins mémorables mais de bonne facture. Le «Allelujah» de Christian Kjellvander ouvre les festivités retenue et délicatesse, une sobriété qui hélas n’est pas toujours l’apanage des autres artistes. Ainsi, le rock de Thomas Dybahl est certes joyeusement entraînant mais n’a pas grand-chose à faire sur cette compil’. On passera sur le titre-gag de Motorpsycho qui clôt l’album en pied-de-nez, pour constater que de nombreux artistes ne réinventent hélas pas la roue. Un air de déjà entendu, plusieurs folkeux-countrysants en devenir qui tâtonnent encore pour trouver leur voie, bref, pas de quoi crier au génie. Et pour finir, quelques gros ratages, tel Christer Knutsen qui ne mérite au mieux qu’un auditoire de bistrot, ou encore une démo mal dégrossie de Tarantula qui s’emmêle les pinceaux.
Lee Hazlewood doit ainsi soupirer là haut et se dire que son héritage n’est pas toujours entre de bonnes mains. Qu’importe au fond, l’essentiel reste sans doute pour lui que le folk poursuive son chemin et défriche de nouveaux espaces. Un jour peut-être l’une de ces jeunes pousses en deviendra l’alter ego ? Il est permis de rêver, pas vrai ?
- runeii, le 9 02 2006