Prairie Wind est un album créé dans la douleur. Après une rupture d’anévrisme en début d’année qui a bien failli le tuer, Neil Young a ensuite dû faire face à la mort de son père en juin. Ces dix morceaux sont les conséquences de tous ces événements, ils témoignent d’une conscience aiguë de la mort et posent un regard sur le chemin parcouru, sur celui qui reste à accomplir. Beaucoup de chansons font écho à un vécu exceptionnel, évoquent le passage du temps et le changement avec humour ("He was the King", chanson parlant d’Elvis, "This Old Guitar") ou nostalgie ("Here for you" - séparations et retrouvailles) dans un style folk classique pour lui, accompagné par un groupe (piano, violons, batterie, etc.).
Les arrangements musicaux restent certes en terrain connu (Comes a Time et surtout Harvest Moon viennent à l’esprit), mais donnent un folk classique de très bonne facture. Neil Young n’a plus rien à prouver, on n’attend pas de lui qu’il fasse de l’electro, et l’essentiel de ce disque se trouve ailleurs. Il y a parfois une légère surenchère d’instrumentation (pas sûr que les cuivres de "Far From Home" soient de très bon goût), mais c’est la voix souvent haut perchée de Neil Young, plus vulnérable que jamais, les mots simples et vrais qu’il utilise, qui font la grande force de Prairie Wind.
Les émotions qui passent à travers la musique ont quelque chose d’indicible qui font de Neil Young la légende qu’il est. "Falling off the face of earth" crystallize toute cette période de sa vie, parlant des remerciements sincères qu’ont pourrait faire à quelqu’un qu’on aime pour tous les moments passés, avant de tirer sa révérence. La mort a tellement impregné cette période qu’elle a fait ressortir l’essentiel, dépouillé de toute fioriture ("The Painter" et le superbe "It’s a Dream" qui rappelle After the Goldrush). Ces très beaux morceaux sont entourés d’autres moins convaincants mais valent à eux seuls le déplacement pour n’importe quel fan de Neil Young (infiniment supérieur à Silver & Gold et plus personnel que Greendale)). Le loner est bien vivant et on espère pouvoir le voir en tournée en Europe avant qu’il ne tire sa révérence....il est permis de rêver !
- JP, le 12 10 2005