Après l’uppercut Barb4ry, puis le camouflet que fut le Versus Tour 2004 (en compagnie des dandys punks DAAU), Ez3kiel revient avec Naphtaline, projet ambitieux et multimédia. Un CD, plus un DVD/DVD-Rom, le tout mis en avant par un packaging à l’esthétisme des plus alléchants.
L’on va se centrer ici, c’est évident, sur le volet exclusivement musical du concept. Mais il serait criminel de considérer les autres supports comme de simples «bonus», présents dans l’unique but de convaincre les curieux d’acheter plutôt que de pirater. Car l’œuvre a dès ses prémisses créatrices été pensée sous cette forme. Le musical et le visuel atteignent ainsi une osmose propre à rassasier tout excès de soif contemplative. Et les amateurs d’interactivité seront comblés.
Un constat: le groupe s’éloigne encore plus de la scène electro-dub française, dont il est toujours considéré comme l’un des fers de lance, avec High Tone. Pour ceux qui sont familiers avec les compositions d’Ez3kiel, on pourrait estimer Naphtaline comme la quintessence de la facette douce et mélancolique de Barb4ry, celle qui vous chatouille les sens avec finesse, s’opposant aux ambiances plombées et à la puissante rage conquérante. On pense au morceau «Le Lac des Cygnes», dont on retrouve une nouvelle version aujourd’hui («Le Lac des Signes»), toute aussi léchée et encore plus hypnotique.
L’élégant univers de Naphtaline se teinte de nuances baroques suggérées, sur quelques morceaux, par les collaborateurs réguliers du groupe classico-anarchique DAAU. Leur doigté de virtuoses, mis au service d’une émotion à fleur de peau, ne passe pas inaperçu sur la première moitié de l’album. Cependant, l’erratique et superbe «Subaphonic» convoque d'autres musiciens au touché tout aussi subtil.
Un autre invité de marque s’immisce à merveille dans ce rêve éveillé: Nosfell. Le chanteur mutant vient balader son timbre sur des hauteurs vertigineuses (le sublime «Lethal Submission»); captivant! D’autres morceaux sonnent très cinégéniques: «Naphtaline» ou «Derrière l’écran» (qui porte bien son nom…) L’influence de compositeurs en leur temps très novateurs, tel Ennio Morricone, se fait ressentir, c’est indéniable. Eh oui, Ez3kiel est de cette tempe là !
[Le titre éponyme en écoute ici]
- yak, le 24 06 2007