Panda Bear aka Noah Lennox est l’une des deux têtes pensantes du groupe Animal Collective, qui a en commun cette même liberté de ton, bien loin de la pop ou du folk conventionnels. Young Prayer, premier album solo du Panda, avait déjà marqué les esprits par son dénuement, son côté sacré, enregistré dans la maison du père décédé.

Si ce dernier était un exercice tout en retenue et en recueillement, Person Pitch ouvre les vannes de la créativité et repart à zéro ou presque, conservant ce côté envoûtant, évoquant ce même sentiment quasi religieux. Pas religieux dans le sens de sérieux ou solennel cette fois-ci, mais par son côté mystique et incantatoire : des mélodies simples, quelques rythmes rudimentaires, un chant repris en coeur, un écho qui évoque les églises.

Les harmonies vocales, évoquant forcément Brian Wilson et les Beach Boys, sont le centre de cette musique, l’axe autour duquel tout le reste tourne. Si les mélodies restent simples, elles sont enrichies d’une foule de détails difficiles à identifier, qu’il s’agisse de percussions (digitales ou autres), de multiples bruits d’arrière-plan ou samples qui se révèlent au fil des écoutes. La production reste très précise, parvenant à créer une musique légère comme l’air ("Search for the Delicious") malgré tous ces sons étranges.

Pourtant, cet album est avant tout une expérience qui se situe au niveau du ressenti - impossible de distinguer les paroles, les titres des morceaux n’évoquent pas grand-chose ("Good girl Carrots", "Take Pills", ...). La vérité se trouve au coeur de cette musique même, comme dans les 12 minutes de "Bro". Une ligne de guitare sur laquelle vient se greffer une voix puis des rythmes, créant au fil des minutes une transe pleine de joie insouciante. C’est ce qu’il y a de bien avec ces chansons, elles forcent à sourire et à se laisser aller à apprécier ce déferlement qui nous emmène très loin du connu.

Les morceaux plus proches du délire total (le bruitiste et expérimental "Good Girls Carrots") fonctionnent moins bien que les autres mais ne font pas tache sur un album débordant de psychédélisme. Autant Young Prayer était rempli de tristesse, autant Person Pitch rayonne d’insouciance, difficile de savoir si les fans du premier aimeront le second. Mais l’air de rien, au niveau créativité et originalité, on atteint des sommets qui forcent le respect, même si une partie des auditeurs trouveront Person Pitch définitivement "too much". Les autres se laisseront vite conquérir par cette musique enivrante et novatrice. A réserver pour ses moments de détente et de régression infantile.

["Comfy in Nautica" à écouter sur son espace]

- JP, le 7 04 2007

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