Très attendu après le fabuleux Feast of Wire sorti en 2002 et In the Reins l’an passé, Garden Ruin constitue une pleine déception. Calexico semble vouloir changer d’orientation musicale, à cela je n’ai rien à redire. Mais l'opus en lui même est bien pâlot et sans réelle saveur.
Clairement, la voie choisie par les deux leaders Joey Burns et John Convertino est une remontée en direction du nord vers le soleil californien. Un départ volontaire loin de cette frontera mexicaine sur laquelle le groupe surfait depuis lors.
Le folk-rock-mariachi du groupe de Tucson se met à nu, ôtant ses amples parures colorées. Le nouvel ensemble sent encore le neuf, la taille ne semble pas convenir, l’inconfort guette. Premiers pas : le mélange pop sixties façon Byrds, Beach Boys ou Love ne prend pas. Le soleil californien dessèche tout, met à jour quelques véritables horreurs («Letter to Bowie Knife»). J’ai la sale impression que mon disquaire s’est trompé en glissant le disque dans la pochette : arrangements acoustiques relativement banals, quelques coups de gueule électriques, sans réelle intensité ni climax. Paradoxalement, le chant de Joey Burns est encore plus assuré et inventif. Et la qualité de l’écrin musical du groupe, certes un ton au dessous de son habitude, est à mentionner (la participation de Calexico sur le dernier opus de Neko Case le confirme).
Ainsi, Garden Ruin ne décolle pas avant la deuxième partie de disque, soit un clin d’œil heureux sur la désormais lointaine patrie des mariachis («Roka» et son groove tropical), un «Nom de Plume» surprenant dans la langue de Molière, carte postale d’un Tom Waits perdu dans les ruelles parisiennes. L’inventivité du groupe ressurgit, on aime à croire que tout n’est pas fini. On aime aussi l’assaut revanchard de «Deep Down», preuve que Calexico peut être saignant à souhait. Le final bruyant de «All Systems Red» ne parviendra pourtant pas à nous convaincre.
Espérons que le groupe retrouve vite un second souffle et qu’il ne se mue pas en ruine, avec oubli et corbeaux comme seule compagnie. Prions pour que Garden Ruin ne soit qu’un faux pas dans une carrière remarquable.
- runeii, le 9 04 2006