Crime &The City Solution > Shine

Shine
1988
Notation
Rock   Gothic   Punk

Certains disques ont ce quelque chose qui vous marque à jamais ; leurs échos reviennent ensuite régulièrement vous hanter, si délicieusement. «Shine» possède ce genre de qualité là ; album central d’une courte discographie d’un combo post-punk australo-allemand, à priori rien de particulièrement palpitant. Et pourtant…

Crime and The City Solution est un collectif né des cendres de Birthday Party en 1984, où se côtoient successivement certains membres des Bad Seeds (Mick Harvey), Einsturzende Neubauten (Alexander Hacke) ou encore DAF. Tous partagent un goût immodéré pour les sonorités âpres de la scène berlinoise des années 80, un profond attachement au blues et un certain romantisme noir. L’ensemble est transporté par Simon Bonney, chanteur atypique et attachant par ses égarements hors des rythmiques ou des harmonies convenues, entre le registre du blues (Nick Cave n’est pas loin) et la déclamation poétique (à la And Also the Trees). Sans aucune part électronique et se distinguant ainsi des combos new-wave gothique de la même période, C&CS garde cette rythmique lente, cette basse collante et poisseuse du mouvement post-punk.

«Shine» se révèle spacieux, oscillant entre finesse des arrangements, retenue et escalades parfois dramatiques. Proche des albums des Bad Seeds période 80’s (notamment «Your Funeral…»), il s’en différencie pourtant. Les lignes de Hacke flirtent avec les sonorités orientales («Angel») ou celtes («On Every Train») tout en gardant cette force brute héritée des Einsturzende Neubauten. Sombre, mais jamais désespéré, «Shine» laisse de l’espace aux silences et à l’éclat soudain de la lumière, souvent par le violon de Bronwyn Adams. S’il fallait garder un titre-phare de l’album, je choisirais l’épique «Steal to the Sea», mémorable modèle d’évocation de l’homme seul face à la sauvagerie de la mer : Bonney harangue les flots comme pris de folie durant 10 minutes de crescendos impressionnistes, avant un déluge à la Sonic Youth. On a rarement vu cela à la fin des 80’s, avant l’éclosion des premiers germes du post-rock.

Toujours en marge d’une franche reconnaissance publique, C&CS collaborera ensuite avec Wim Wenders sur plusieurs films (dont «Wings of Desire»), sortira un cinquième album étonnant en 1990 («Paradise Discotheque»), opus final développant un style de plus en plus éclectique et personnel. Témoignage injustement oublié d’une période musicale riche et inventive, la discographie de C&CS mérite une réhabilitation !

- runeii, le 28 01 2006

Réactions

par patrice, le 5/11/2006
La chronique de runeii resume à merveille cet album les mots sont justes et evoquent parfaitement ce que l'on ressent à l'écoute de ce trés grand album , moi aussi j'attend avec impatience une rehabilitation pour ce groupe et une réedition des albums , je trouve aussi que dans la presse spécialisée on ne parle jamais de Simon Bonney et sa bande.
par jim, le 15/07/2006
oui crime&the city solution est un groupe injustement sous estimé et qui mérite largement d'êtree découvert, leur trilogie berlinoise débutée par shine est un grand moment de musique... pour moi bien au delà de bien d'autres groupes de la même époque... entre le blues tordu et hanté de nick cave, les expérimentations poétiques des doors, et le romantisme noir d'un cure ou d'un also the trees... ces albums méritent bien mieux que la relative ignorance qui les entoure.