Il y a de ces groupes que l’on découvre sur le tard, groupes mythiques qui n’existent plus aujourd’hui, qui nous font tomber la mâchoire inférieure au niveau du sol et décoller en moins de 30 secondes d’écoute (si, si!). Je ne connaissais pas Slowdive, honte sur moi ! Rattraper ce terrible handicap fut un plaisir rare, plaisir que je souhaite à tous ceux qui aiment le rock planant, doux et lourd à la fois, accessible mais surprenant. C’est un peu comme d’écouter de la musique pop au fond d’une piscine, le son se déforme, devient liquide, et on est envahi d’une agréable torpeur, navigant entre rêve et réalité. Il y a aussi un petit côté gothique évoquant les Sisters of Mercy ou The Mission au niveau vocal, sans les excès de ces derniers. Souvent catégorisés "ambiant" à tort - sans doute à cause de la collaboration de Brian Eno sur quelques morceaux - Slowdive combine admirablement calme et aggressivité, clarté et obscurité. "Souvlaki" reste ancré dans le rock, offrant une belle alternative à la pop anglaise traditionnelle, à des années-lumière de celle-ci et en même temps pas si loin.
L’ambiance est résolument mélancolique, onirique, le son est profond, les nappes de synthés lisses et immaculées comme l’eau, la basse et la batterie pulsent des profondeurs, alors qu’on entend les harmonies vocales de Neil Hastead et Rachel Goswell dans le lointain. Les guitares traffiquées, pleines d’écho et de délais font également la beauté de cette musique. Contrairement à son successeur "Pygmalion", principalement électronique (et presque aussi indispensable), "Souvlaki" est à la fois calme et percutant, rempli de morceaux imparables comme "40 days" et "Machine Gun" - compositions pop / rock d’une efficacité incroyable, directes, avec des réverbérations de guitares assez magiques, les couplets et refrains étant instantanément prenants. Magique. Dans un autre registre, "Soulvaki Space Station" est un morceau plus long, au son plus monstrueux, avec toujours un groove profond et des sons venus d’ailleurs, grâce aux bidouillage des synthés et des guitares. "Dagger" est 100% acoustique, d’une simplicité biblique, avec de très belles harmonies vocales, qui touchent droit au but.
Seul point négatif de ce disque, la production - la personne responsable des fade-outs assassins sur "40 days" et "Machine Gun" mérite une mort lente...espérons que Sanctuary aura la bonne idée de remastériser les 3 disques de Slowdive dans un futur proche. A noter encore que la version américaine de "Souvlaki", sortie 8 mois plus tard, comporte 4 bonus tracks présents sur le EP "5", plus axés électro/ambient.
- JP, le 6 06 2005