Vous êtes fatigués des dark folkeurs(euses) dépressifs et blasés de l'Americana quotidienne? Scott Tuma a la parade: 12 vignettes instrumentales "en chair et en os", véritables petits délices pour les sens, chaleureuses et fantômatiques à la fois.
Le nom de Scott Tuma me rappelle vaguement la fin des années 90's, et l'expansion d'un fantastique site appelé Epitonic, mine d'or de MP3's de qualité. A l'époque, 2 titres de son premier album étaient en téléchargement gratuit (ils y sont toujours). 5 ans après un deuxième album passé quelque peu inaperçu, l'ex-Souled American revient avec un Not for Nobody qui semble promis à un meilleur sort.
La maîtrise du silence et le sens du timing sont les grandes forces de cet album: avec un écho chaleureux - pendant acoustique du fameux "delay" d'un Robin Guthrie - Scott Tuma tisse une profondeur de son peu commune grâce à ses mélodies bien choisies. Les fines textures caressent l'oreille, on a l'impression de pouvoir "toucher" les notes, tant elles sont incarnées. Chacune a son timbre, sa tonalité qui provoquent des émotions bien précises. Not For Nobody est principalement lumineux - ces notes éparses de guitare flamboyantes semblent jouer avec nos cordes sensibles. A de plus rares moments, Scott Tuma explore des contrées plus sombres (la texture de "Newjoy" faite d'harmonium), ou franchement étranges ("Lovesrock", ses chants d'oiseaux et ses cordes dissonantes). Les titres se situent à cheval entre ambiances pures et mélodies, ces dernières se transformant souvent en de simples textures. Le seul morceau "chanté", si l'on peut dire (écoutez plutôt "Nobody (River of Thin)"...), utilise une voix trafiquée et accélérée qui semble sortie de la nuit des temps.
A mi-chemin entre le minimalisme expressif de Library Tapes et le folk abrasif d'un M. Ward, Scott Tuma touche au but avec ses ambiances boisées et évocatrices - la face lumineuse du folk dans toute sa fragilité, un mini-feu d'artifice nocturne à déguster en solitaire.
- JP, le 10 04 2008