Nous sommes en 1989, onze ans après les Sex Pistols, deux ans avant Nevermind de Nirvana, les coupes mulets sont toujours d’actualité, le mur de Berlin va s’effondrer, Ceaucescu le dictateur roumain sera fusillé, Patrick Bruel se casse la voix, et l’Amérique et la Russie déclarent la fin de la guerre froide. C’est bon ? Vous y êtes ?
Le groupe, est composé de Duane Denison à la guitare, David W. Sims à la basse et David Yow à la voix (le terme de « chant » paraît mal indiqué pour décrire ce mélange de hurlement tantôt, désespéré tantôt hargneux et trop souvent mal aimé par les béotiens ).
Ils enregistrent à l’aide d’une boîte à rythme leur premier album :Pure.
Album glacial, froid comme un passage sous-voie et sombre comme un dimanche après-midi… La basse y est métronomique, la guitare se fait scalpel incisive ou lancinante, la voix se cherche peut-être encore un peu, mais le grain est déjà là et son rendu est parfois si distordu qu’elle fait passer la guitare pour presque cristalline. Cristalline, mais pas inoffensive.
La boîte à rythmes ajoute encore un sentiment de malaise, un tabassage mental digne de Guantanamo. Enfin, les textes ne sont pas moins évocateurs…
« Blockbuster » parle de ce qui arrive lorsque l’on veut jouer au plus malin avec plus fort, et plus imaginatif que soi.
« Bloody Mary » parle vraisemblablement d’Elisabeth Bathory, comtesse hongroise connue pour son goût pour la torture et les bains de sangs de jeunes filles dont elle se délectait.
« Rabid Pigs » de porc enragés, vulgaires et dangereux, et c’est l’ouverture de la chasse…
« Starlet » de quelqu’un qui ne se souvient plus très bien mais qui est a du sang sur ses vêtements, et ce n’est pas le sien…
La touche spécifique des Jesus Lizard ?
Ils aiment employer des rythmes qui vous caressent à rebrousse poil. Ils sont là où vous ne vous y attendez pas encore, où vous les attendiez plus, c’est ce qui fait l’originalité de leurs morceaux, ce qui engendre ce fameux sentiment de malaise, comme si vous surpreniez vos parents dans leur intimité, partageant leurs ébats avec « Woofy » le brave labrador familial enterré depuis deux semaines…
Les Jesus Lizard, la précision au service de la perversion.
Le groupe se séparera en 1999, nous laissant une poignée d’albums rugueux et presque venus d’ailleurs.
- Telecalde, le 2 10 2009