Baier, Sibylle > Colour Green

Colour Green
2006
Notation
Rock   Folk

Chaque semaine ou presque, un nouvel artiste folk 70’s est sorti de l’oubli, réédité après x années de silence pour des critiques dithyrambiques ; c’est donc avec un certain scepticisme que j’ai découvert cet album quelque temps après sa sortie sur le label Orange Twin en 2006.

L’histoire de Sibylle Baier a le mérite d’être unique à ma connaissance : au début des années 70, une jeune Allemande d’une vingtaine d’années part en voyage à travers les Alpes suisses et l’Italie ; voyage initiatique à la suite duquel ces chansons seront enregistrées, sur une période de 3 ans, à l’aide d’un appareil "Reel to Reel". Mais attention, il n’a jamais été question ici de faire une carrière dans la musique, Sibylle Baier est plutôt une sorte de muse chantant uniquement pour sa famille et ses amis. Ce n’est qu’une trentaine d’années plus tard que son fils, qui a conservé les bandes originales, les sortira de l’oubli un peu par hasard.

Après plus de 30 ans de silence, on dirait que Colour Green a attendu le moment parfait pour sortir, tellement il semble à sa place dans notre époque, à moins que ce ne soit la preuve de son intemporalité. Accompagnée d’une seule guitare acoustique, la voix de Sibylle Baier est fragile, parfois chuchotante, remplie de lassitude adolescente, quelque part entre la douceur de Vashti Bunyan et la mélancolie de Chan Marshall. La simplicité et la pureté sont à l’ordre du jour, et ce disque ne s’écoute pas dans n’importe quelles conditions : on entre dans cet univers comme on ouvre un journal intime resté longtemps fermé. L’absence de calcul derrière cette musique et son honnêteté font aussi sa force.

Ancêtre du home recording, Colour Green est indissociable de son histoire et ravira les amateurs de folk pastoral et épuré. Enregistré pendant une période pleine de doute et de noirceur, ces chansons sont envoûtantes, d’une mélancolie tout en retenue, portées par cette voix fragile et fascinante ("Driving", "The End"). Un vrai mythe comme on n’en fait plus, qui en fera rêver plus d’un : et si dans mon propre grenier se cachait une étoile depuis longtemps oubliée ?

- JP, le 17 07 2007