Jesu > Conqueror

Conqueror
2.2007
Notation
Rock   Metal

Ce second album assène, si vous ne l’aviez pas déjà compris, que Jesu est un élément incontournable de notre époque musicale et qu’on ne peut se passer de lui. Oui, les riffs de guitare de son leader Justin Broadrick terrassent toujours toute stéréo un temps soit peu fragile... Oui, son sens de l’orchestration et du traitement sonore remplit toujours plus finement votre ciel lugubre de brefs moments d’espoir...

Mais ne gâchez pas votre plaisir pour si peu, car les huit expériences proposées ici rendent honneur à une nouvelle définition des musiques considérées comme extrêmes, bien loin du gros son de guitare bourrin et de la technique pure de nombreux combos post-core-metal actuels.

Jesu, c’est plus une pièce d’orfèvrerie, et sous la matière brute (et brutale) se profile un sens mélodique bien senti emprunté au shoegazing des années 90. My Bloody Valentine, vous l’aurez compris, est encore convié, Conqueror poursuivant le virage entamé par Silver (EP sorti en 2006). Mais il arrive parfois qu’au cœur des harmonies survienne sans crier gare la grandiloquence baroque d’un doom métal du meilleur esprit (Icon des alors inspirés Paradise Lost, ou My Dying Bride période Like Gods of the Sun ). Etrange rencontre d’harmonies et d’époques différentes sur un tempo pachydermique.

Immersion totale et hypnotique à laquelle nos sens sont conviés, cette bande-son confronte les âpretés de l’environnement urbain à la richesse des émotions bien humaines, principalement véhiculées par Justin lui-même (et de mieux en mieux par ailleurs). Ses vocaux oscillent au dessus des riffs géométriques, magma des claviers et autres samples ; ses propos se voient répétés en rappels incessants (les dix minutes de «Weightless & Horizontal»)), tantôt tendres, tantôt mélancoliques, comme pour nous arracher à cette brutalité souterraine. En cela, Conqueror est profondément moderne et saisit parfaitement la cohabitation douloureuse de l’homme avec le rude béton et le verre.

Eprouvant aussi, il faut le dire, mais divinement mûri et favorables aux écoutes répétées, Conqueror c’est votre antidote à la grisaille quotidienne. Rendons donc grâces...


- runeii, le 25 02 2007