Deuxième album de Jessica Bailiff pour la label Kranky (Low, Windy & Carl, Stars of the Lid), Hour of the Trace représentait un vrai challenge, après un premier album plutôt réussi (Even in Silence en 1998) évoquant le space rock de Windy & Carl. Le virage s'avère particulièrement réussi, confirmant tout le talent et l'inventivité de cette adepte du "home recording". Jessica arrive à un équilibre intéressant entre expérimentation et chanson, variant les sonorités et les ambiances avec facilité.
L'instrument principal reste la guitare, électrique ou acoustique, créant à la fois des textures et des mélodies. Un grand soin a été apporté au traitement du son : distorsion monstrueuse sur "After Hours", ou la guitare électrique crache du feu et des éclairs ; amplification plus subtile des basses sur la guitare acoustique de "Toska"; délai et réverbération sur "Crush", accompagnés de la voix de Jessica Bailiff qui nous plongent dans un océan de douceur.
Cette voix, justement, est l'un des attraits de cette musique, et non des moindres. Ce mince filet de voix possède une beauté faite de candeur, d'absence d'affectation. Ce chant tout en retenue, à la mélancolie sous-jacente, s'intègre à merveille dans cette musique. "Warren" la retrouve dans toute sa beauté et sa simplicité, baignée par la réverbération d'un orgue et accompagnée par une mélodie à la guitare. La douceur et la plénitude qui émanent de cette musique font voyager l'auditeur très loin de la grisaille.
Si ces morceaux nous font toucher le ciel, d'autres nous transportent dans un désert aride et inquiétant : "Amnesia" retrouve des guitares squelettiques, une basse désincarnée, et la voix blanche de Jessica Bailiff qui n'a rien de réconfortant. Quant à la pièce centrale de l'album ("How Our Perception of Distance Is Changed With Each Passing Hour"), c'est un morceau instrumental de plus de vingt minutes, totalement en marge du reste de l'album, collage sonore rappelant les expérimentations d'un groupe comme The Azusa Plane, avec des variations de volume qui rendent la musique à peine audible par moment. Malgré des moments intéressants, c'est le seul temps mort de ce disque qui réunit plusieurs influences différentes de façon originale. Une artiste inspirée à découvrir.
- JP, le 12 04 2006