Les dernières traces de hip hop présentes dans la musique de Boom Bip ont disparu ici, chaque morceau est un petit univers distinct, évoquant parfois les Boards of Canada aux niveau des ambiances, mais réussissant souvent à créer quelque chose de novateur. Les atmospheres sont vraiment prenantes, à l’image du dernier titre, l’une des deux collaborations (The Matter avec l’étonnante Nina Nastasia), ballade atmosphérique dont les mots lourds de sens apportent beaucoup. La majeure partie du disque est instrumentale, et pourtant chaque morceau est comme un petit film suivant une évolution tangible, prenante. Contrairement à beaucoup d’albums électroniques purs et durs, "Blue eyed in the red room" abonde en émotion, en humeurs, tour à tour inquiétant ("Cimple"), incantatoire (l’inclassable "Do’s and Don’t", avec Gruff Rhys), ou incroyablement mystérieuse (la guitare acoustique fragile de "One eye round the warm corner").

Boom Bip joue de tous les instruments : guitares, synthés, rythmes electro, et une multitude d’autres sons. Il n’y a pratiquement aucun sample. Cette approche originale donne une musique très vivante, un mélange électro-acoustique très riche, même si l’émotion prime sur la simple expérimentation. "Blue Eyed in the red room" est un album bourré de talent qui reste diablement accessible, malgré de nombreuses innovations. Boom Bip se révèle être un véritable multi-instrumentaliste, sorte de DJ Shadow qui jouerait tous ses samples avec une sensibilité proche de celle des Boards of Canada.

- JP, le 27 04 2005