Puisqu'il est désormais parti un sinistre 15 septembre 2008, il ne nous reste qu'à se plonger dans ce qui restera, en dehors de son indiscutable apport à l'œuvre d'un des plus grands groupe de tous les temps, comme l'œuvre la plus consistante du clavier du Pink Floyd. Si son autre effort solo (Wet Dream) paru en 1978 n'était qu'une succession de titres plutôt anecdotiques, Broken China est une œuvre bien plus consistante. Déjà la pochette, œuvre de Storm Thorgeson qui crée les pochette du Floyd depuis Atom Heart Mother, est l'une des plus réussie, illustrant une femme se désintégrant dans un tourbillon aquatique puis en ressortant reconstruite au verso. Artwork résumant le concept de l'album qui tourne autour de la vie de l'amie de Rick.
Œuvre en seize titres et découpée en quatre parties : 1) l'enfance difficile de la jeune fille; 2) la difficulté d'intégrer ce passé dans son monde de femme 3) la dépression qui s'ensuit inévitablement, l'abandon de toutes les forces encore disponible et enfin, 4) le retour à une vie plus heureuse grâce, of course, à l'amour. Ceci étant, ce qui nous intéresse encore plus, ce sont les compositions. En son temps, Rick avait dit que d'avoir chanté sur "Wearing the Inside Out" (The Division Bell – 1994) lui avait donnée envie de réutiliser sa voix, et c'est déjà le premier élément à souligner. Sa voix n'est pas une grande voix, non! Mais elle est parfois hésitante, parfois maladroite, souvent émouvante et chaude, collant avec le personnage. Par moments, on a l'impression d'entendre un clone timide d'un David Bowie période Outside. Enfin sur deux titres, l'artiste est accompagné par la troublante Sineà d O'Connor qui émerveille de finesse et de splendeur sur le sublime "Reaching for the Rail" ainsi que "Breakthrough", titres venus d'ailleurs, sommets d'émotion et de beauté.
Côté musique, c'est bien évidemment les claviers qui sont majoritairement à l'honneur et l'on reconnaît bien la patte qui a participé à l'écriture des chefs-d'œuvres du Pink Floyd, même si le son est plus proche d'un Division Bell que d'un Dark Side of the Moon. Fleuretant par moments avec l'électronique lourde, Broken China reste néanmoins principalement basé sur les atmosphères planantes que ne dénigrerait pas un Angelo Badalamenti ("Blue Room in Venice" aurait parfaitement pu figurer sur la BO de Lost Highway, sorti la même année !). Les guitares ne prennent pas ici toute la vedette, même si elles sont bien présentes, on ne renie pas 30 ans d'amitié avec David Gilmour comme cela. Mais Rick a eu la bonne idée de ne pas retenir son compère ici, qui aurait peut-être pris trop de place, et se contente de solos qui rappelle certains passages Floydien, soulignant le lien en finesse. Enfin, la batterie de Manu Katché complète l'équipe nécessaire à la réalisation d'un bon cru.
Si ce disque ne marquera pas les mémoires, restant dans l'ombre des disques de Pink Floyd et de ceux de Waters et Gilmour, il colle ainsi tout à fait à l'image de cet homme discret qu'a été durant toute sa carrière Richard Wright. Il n'en reste pas moins qu'à redécouvrir a posteriori, Broken China est un disque qui comporte de réels moments de grâce.
- le sto, le 22 12 2008