C'est bien la dernière chose que l'on attendait par les temps qui courent, mais pourtant il faut se rendre à l'évidence, 2008 pourrait être l'année de la surprise Rondo Veneziano. Le groupe mené de main de maître par Gian Piero Reverberi s'est offert un surprenant virage alternatif qui ne peut que faire parler de lui. A l'occasion des 30 ans du premier album, le groupe a décidé de reprendre ses plus grands classiques en s'adjugeant les services d'artistes plutôt inattendus et triés sur le volet.
D'entrée de jeu c'est "Aria di Festa Veneziana" issu de La Serenissima qui est repris sur un mode plus lent et sourd que l'original et qui se marie aux guitares lancinantes de Maynard James Keenan. La finesse est toujours de mise avec "Nostalgia di Venezia", titre sombre mais magnifié par les sonorités envoutantes de Robert Wyatt qui prête son timbre de voix si caractéristique teinté d'une sourde mélancolie. Cat Power (qui signe ici sous son nom d'état civil de Chan Marshall) quitte un instant son Memphis Blues Band pour venir lover sa voix aux cordes fragiles d'"In Fuga di Venezia", soutenu par un Bono des grandes heures qui fait plaisir à retrouver.
La mélancolie pourtant n'est pas tout sur Magia di Venezia 2010, les titres rythmés se ménagent également une part importante avec l'arrivée de Brian Molko et Mark Lanegan qui cassent la baraque sur un "Prestige" transfiguré. La version de "Luci e colori di Venezia" initialement jouée avec Metallica n'apparaît pas sur l'album pour d'obscures raisons de droits d'auteurs; qu'importe car elle a été ré-enregistrée avantageusement au dernier moment par W.A.S.P. On notera encore les apparitions remarquées de Trent Reznor et Rogers Waters qui mélangent leurs angoisses noires aux alléchantes flûtistes veneziennes.
Bien entendu, malgré toutes ces réussites, il convient de marquer quelques fautes de goût qui pourrait retenir quelques incrédules, notamment "Omaggio di Venezia" où Rondo marie ses cordes, batteries et flûtes avec les voix enregistrées de Freddie Mercury et Elvis; hommage d'un goût plutôt douteux. Et puis il y a également la version de "Larmes de pluie" qui aurait définitivement du être confiée à quelqu'un d'autre qu'au duo bancal composé de Kool Shen et Jean-Jacques Goldman (!).
Reste que Magia di Venezia 2010 est un album étonnant, surprenant et pourquoi pas dérangeant et déroutant. Il mérite plusieurs écoutes avant d'entrer de plein pied dans la "magie de Venise". Et étonamment on se prend à trouver que le rock alternatif et les orchestres symphoniques peuvent faire parfois bon ménage! Belle surprise!
- le sto, le 1 04 2008