Un piano, quelques field recordings sous forme de grattements, du bruit de la pluie ou d’un train qui part, une sensation d’enregistrement digital usagé (la "tête de lecture" saute légèrement par moment) : voilà pour résumer tout ce qui compose Library Tapes. Volontairement réducteur, ce résumé ne montre que les moyens, modestes, qui pourtant nous font dresser l’oreille. Si le minimalisme est à l’ordre du jour, cet album arrive pourtant à créer un lien avec l’auditeur et à toucher une multitude de cordes sensibles, dont on ignore le pourquoi et le comment.

A des années-lumières d’un ambient clinique et impersonnel, le groupe suédois se situe dans une sensibilité plus classique, de par l’instrument dominant – le piano. On pourrait évoquer le travail en demi-teintes de Max Richter ou Philip Glass, la science du silence de Stars of the Lid ou le piano minimaliste de Harold Budd (la mélodie de "Distans" évoque de façon troublante "Late October" présente sur The Pearl)

Petites causes, grands effets, donc : la qualité du son y est forcément pour quelque chose, les bruits d’ambiance donnent un côté fragile et hanté à la musique. La résonance chaude et langoureuse du piano permet à cet album d’éviter toute lourdeur : loin d’être joyeux, ces courts morceaux sont pourtant bien loin d’être glauques et évoquent quelque chose de plus complexe – un mélange d’émotions. Nostalgie et insouciance se mêlent dans une sorte de candeur, à la manière des mini-symphonies de Dead Texan.

Cette musique provoque une étrange fascination, forçant l’auditeur à écouter. Aussi calme qu’une légère chute de neige, elle est apaisante et réflective. Aller plus loin c’est ce heurter au mystère de toute bonne musique, qui touche à l’universel et ne peut s’expliquer. Avec la venue de l’hiver, Höstluft est la bande originale parfaite pour les méditations solitaires. Seul bémol, la brièveté de cet opus, qui nous oblige à abuser du bouton « replay », preuve que cet album a un côté singulièrement addictif.

- JP, le 28 09 2007